Les histoires de l’Oncle Tatoo est un livre illustré par Rascal et Peter Elliott. L’oncle Tatoo, motard tatoué, reçoit la visite de ses nièces. Il leur raconte des histoires amusantes et loufoques sur l’origine de ses tatouages, qui transmettent un message profond : les tatouages ont une véritable symbolique.
Je suis une inconditionnelle du personnage de bande dessinée, Philémon. Les illustrations du livre Les histoires de l’Oncle Tatoo m’ont fait penser à l’univers graphique de son créateur, Fred. J’ai donc interviewé Peter Elliott et Rascal pour en savoir plus sur l’histoire de cette collaboration.
Texte : Alexandra Bay – Article publié sur Inkage et Jeter l’Encre

Interview de Peter Elliott et Rascal
Alexandra Bay : Bonjour Rascal, bonjour Peter. Dites-moi, comment vous est venue l’idée de créer Les histoires de l’Oncle Tatoo ?
Peter : L’envie de travailler à nouveau ensemble après déjà quelques belles collaborations. Cette histoire me permettait de mettre en œuvre une technique que j’aime bien : intégrer des dessins dans des photos.
Nous avions déjà traité ce thème au travers de Horace l’un des personnages d’Étoile qui est tatoué de la tête aux pieds.
Peter Elliott
A.B. : Qui a eu l’idée de centrer le thème du livre sur les tatouages ? Pourquoi ?
Peter : C’est Rascal. Nous avions déjà traité ce thème au travers de Horace l’un des personnages d’Étoile qui est tatoué de la tête aux pieds. Étoile est une BD que nous avions produite ensemble quelques années plus tôt.
A.B. : Était-ce la première fois que vous collaboriez ensemble ?
Peter : Notre rencontre s’est faite au sein de notre maison d’édition Pastel. Notre premier album ensemble, c’est Poussin Noir en 1997.
A.B. : – Rascal, j’ai été étonnée d’apprendre que tu avais souvent fait l’école buissonnière. Le texte est pourtant d’une grande maîtrise, et les contes débordent de poésie. As-tu tout appris en autodidacte ?
Rascal : C’est exact ! J’ai aimé l’école jusqu’à mes 12 ans. Tout m’intéressait alors. Apprendre à lire, écrire, calculer, l’histoire, les sciences, la géographie. Ce savoir en poche, j’en savais assez pour me débrouiller dans la vie. C’est ce que je pensais. De plus, j’étais sans grandes ambitions. Je me souviens avoir eu le désir d’être clochard. Dans le genre Charlot, Rimbaud !
Je m’ennuyais sur les bancs de l’école « traditionnelle » et les résultats n’étaient pas très concluants ! Tout s’est arrangé quand je me suis inscrit à l’Institut Saint-Luc, qui est une école d’art située à Bruxelles.
Peter Elliott
A.B. : Peter, toi aussi, tu es un autodidacte, dont l’école n’a pas su révéler le potentiel. Depuis quand le dessin fait-il partie de ta vie ?
Peter : C’est à peu près cela. Je m’ennuyais sur les bancs de l’école « traditionnelle » et les résultats n’étaient pas très concluants ! Tout s’est arrangé quand je me suis inscrit à l’Institut Saint-Luc, qui est une école d’art située à Bruxelles. J’ai enfin pu faire ce qui m’éclatait… et ce type d’étude, d’autre part, me laissait le temps de faire de la musique.
Pour le reste, comme l’Oncle Tatoo vit « dans ma maison » – puisque c’est chez moi que j’ai pris les photos nécessaires à la réalisation des images… les amplis, les guitares… – tout était sur place.
Peter Elliott
A.B. : Peter, tu es également musicien dans un groupe. Est-ce la raison pour laquelle on retrouve autant de clins d’œil à la musique dans le livre — comme les posters de Led Zeppelin ou le prénom du chihuahua, Sid ?
Peter : En effet, je suis musicien. Je fais un lien très étroit entre la musique et le dessin, mais je ne suis pas le seul à aimer le rock’n’roll, Rascal aussi ! Sid (Vicious) c’est son idée. Pour le reste, comme l’Oncle Tatoo vit « dans ma maison » – puisque c’est chez moi que j’ai pris les photos nécessaires à la réalisation des images… les amplis, les guitares… – tout était sur place.
Avant qu’il n’envahisse les corps de toutes les couches de la société, le tatouage était essentiellement rebelle. Et comme je connais plus de rockers que de marins ou d’ex-taulards… La figure du vieux rocker s’est tout naturellement imposée.
Rascal
A.B. : Comment avez-vous choisi le design des personnages du livre Les histoires de l’oncle tatoo ?
Rascal : Cela faisait un bail que nous avions envie de retravailler ensemble, Peter et moi. À force de se le dire, j’ai un jour pris le temps de concrétiser notre désir. Je suis fasciné par les tatouages et si j’étais plus courageux, j’aurais, comme mon arrière-grand-père ou mon frère, les bras et le torse tatoués de roses, d’oiseaux, de sirènes, de prénoms, d’animaux sauvages et de « que sais-je encore ? ».
Avant qu’il n’envahisse les corps de toutes les couches de la société, le tatouage était essentiellement rebelle. Et comme je connais plus de rockers que de marins ou d’ex-taulards… La figure du vieux rocker s’est tout naturellement imposée. Voilà pour le point de départ d’Oncle Tatoo. Le reste est un mélange d’influences digérées. De Big Fish de Tim Burton en passant par le fabuleux Philémon de Fred.
Peter : J’essaie de me poser le moins de questions possibles. Le texte me guide, mais pour le reste je laisse venir les choses naturellement. Je fais beaucoup de croquis… à un moment, le personnage tel qu’on peut le voir dans l’album apparaît. En général, je le sens tout de suite. C’est lui et personne d’autre !
Je prends plaisir à explorer de nouvelles techniques, à ne jamais faire deux fois la même chose.
Peter Elliott
A.B. : J’ai beaucoup aimé la manière dont vous mêlez illustration et photographie. Est-ce une façon, pour vous, d’entrelacer imaginaire et réalité ?
Peter : Je prends plaisir à explorer de nouvelles techniques, à ne jamais faire deux fois la même chose. Dans mon coin, j’avais déjà bricolé quelques montages du genre. Ici, le texte et la forme du livre se prêtaient bien à cette technique. J’ai sauté sur l’occasion. Ce qui m’amuse, c’est qu’une fois mélangées au dessin, ces photos issues du réel, basculent dans l’imaginaire, comme si le récit, le dessin et l’imaginaire prenaient naturellement le dessus sur la réalité.
Non que je sois à court d’idées, mais l’envie de passer du temps avec mon fils, et de confronter son jeune cerveau fantasque au mien me charmait.
Rascal
A.B. : Rascal, tu remercies « le cerveau de ton fils » pour sa contribution aux récits. Est-ce que ces histoires ont d’abord été testées sur vos propres enfants ?
Je n’ai jamais testé mes histoires avec mes enfants lorsqu’ils étaient mômes. Uniquement ma cuisine ! Pour ce qui est du singulier remerciement, voici le pourquoi du comment : après avoir jeté les bases et écrit prologue et première histoire, j’ai eu envie de travailler avec mon fils Lucas. Nous avions rendez-vous dans un café. J’avais dans ma poche un Larousse de poche.
Au hasard des pages, nous prenions un mot et des réflexions s’ensuivaient tout autour de bouteille, caméléon, arrosoir ou moulin vent. Nos idées allaient de l’un à l’autre, comme une balle du tournoi du Grand Chelem. Et les histoires naissaient aussi vite qu’une partie de billard. Non que je sois à court d’idées, mais l’envie de passer du temps avec mon fils, et de confronter son jeune cerveau fantasque au mien me charmait. Après, il m’a fallu seul, ordonner, trier, organiser nos idées communes en histoires et les raccrocher à celles déjà existantes.
Il s’était fabriqué une petite roulotte tirée par un grand chien et mangeait quelquefois du hérisson. Voilà le mythe !
Rascal au sujet de son aïeul tatoué
A.B. : Êtes-vous tatoués ? De plus, Rascal, tu m’as dit que ton aïeul était entièrement recouvert de tatouages, depuis sa tête jusqu’à ses pieds.
Rascal : (Ok pour l’expression, mais selon ma mère, son visage était vierge) C’est ce qu’il se raconte dans la famille. Il s’était fabriqué une petite roulotte tirée par un grand chien et mangeait quelquefois du hérisson. Voilà le mythe ! Mon frère Stéphane est tatoué, ainsi que l’un de mes fils. Ils ont hérité de cette passion qui avait sauté deux générations. Je ne le suis pas. Non par manque de goût, mais plutôt par crainte des aiguilles et du sang.
Peter : Oui, je porte une spirale tatouée sur l’épaule gauche. Ce symbole (si simple pourtant, il ne s’agit que d’une simple ligne) me parle beaucoup. Il a à mes yeux beaucoup de sens.
Lorsque je rencontre un ado à la piscine avec tatoué sur son dos un long et large NI DIEU NI MAITRE. Je préfère le penser.
Rascal
A.B. : Quel est votre avis sur la place du tatouage dans la société actuelle ?
Rascal : Je n’ai pas d’opinion. Chacun fait ce qu’il veut de sa peau. Je pense aussi qu’il y a un effet de mode. Lorsque je rencontre un ado à la piscine avec tatoué sur son dos un long et large NI DIEU NI MAITRE. Je préfère le penser.
Peter : Il s’agit pour moi d’une démarche personnelle… je me suis toujours foutu de savoir ce que l’on pouvait en penser. Ce qui compte pour moi, vu le caractère définitif de la chose, c’est que le tatoué puisse assumer pour toujours le sens que prend ce dessin inscrit sur son corps (ou aucun sens, pourquoi pas, mais il faut pouvoir vivre avec sans regret). En bref, il faut que le tatoué se sente bien dans sa peau. Pour moi, le regard de la société est secondaire dans cette démarche.
Faire un livre c’est jeter une bouteille à la mer…
Peter Elliott
A.B. : Comment le public perçoit-il Les histoires de l’Oncle Tatoo ?
Rascal: En littérature jeunesse, il y a très peu de retours de lecteurs. Ce n’est pas spécifique à ce livre.
Peter : Faire un livre c’est jeter une bouteille à la mer… ce qui se passe après, c’est l’affaire des lecteurs et du public. Ceci dit, certains m’en ont dit beaucoup de bien (les autres se taisent en général ?)
Je suis plutôt musicien pour le moment. Je prépare l’enregistrement d’un quatrième album avec les gars de mon groupe.
Peter Elliott
A.B. : Quels sont vos projets en cours de réalisation en ce moment ?
Rascal : Le projet de passer un beau mois d’août à Barcelone. À ne rien faire et profiter de tout.
Peter : Je suis plutôt musicien pour le moment. Je prépare l’enregistrement d’un quatrième album avec les gars de mon groupe. Ce qui ne m’empêche pas de dessiner quand même et d’avoir des projets graphiques, dont il est un peu tôt de parler pour le moment. Je signalerai juste que sort en septembre « Mon Amour Trop Loin » mon dernier album réalisé seul (texte et images).
Pour acheter le livre : www.chantelivre.com
Editeur : L’Ecole des Loisirs (24 mars 2011)
Collection : Pastel
Langue : Français
ISBN-10: 2211202969
ISBN-13: 978-2211202961
