Les femmes Chin aux visages tatoués

Dans les montagnes de l’état Chin, situées dans le Myanmar (ex Birmanie), les femmes portent avec fierté le tatouage facial. Enfin, les femmes les plus âgées, car la pratique a été interdite par le Gouvernement birman dans les années 60. Des lignes, des points ou la peau entièrement bleutée, les dessins diffèrent selon les tribus. Et il y a plus de 50 groupes ethniques dans le seul état Chin.

Une légende populaire raconte qu’un roi birman aurait enlevé sa future épouse, une Chin. La belle se serait échappée puis incisé la peau du visage pour devenir méconnaissable. C’est ainsi que les femmes Chin auraient perpétué la tradition. Depuis l’interdiction par la dictature, les jeunes générations ont délaissé cette pratique. Les femmes aux visages tatoués voient leur tradition mourir. Elles espèrent contribuer, comme attraction locale, au développement touristique de leur pays.

Texte : Alexandra Bay – Article Paru dans Tatouage Magazine

Des légendes populaires

Dans les montagnes brumeuses de l’état Chin, une légende populaire raconte l’histoire des femmes aux visages tatoués : « Il était une fois les rois de Bagan, toujours plus avides de pouvoir, qui menaient la guerre contre les peuples voisins. Même les guerriers de la région de Chin tombèrent sous le joug du lointain royaume, situé le long du torrent Ayeyarwady. Depuis les coins les plus reculés de son royaume, le roi ordonna que les plus belles filles vierges lui soient apportées pour devenir ses maîtresses et ses femmes. Les habitants de Chin pleuraient la perte de leurs filles et se mirent rapidement à trouver des solutions afin d’éviter d’autres enlèvements. Ils décidèrent étant donné l’extraordinaire beauté des femmes Chin que la seule façon d’éviter l’esclavage cruel de leurs jeunes filles était de les rendre moins attrayantes aux yeux de leurs assaillants. Dès lors, pour que les Chin sauvegardent leurs filles à jamais, toute femme en devenir devait avoir le visage couvert de tatouages. C’est ainsi que les Maung-Ju, les faces sanglantes, symbolisèrent l’indépendance des Chin aux yeux des dirigeants extérieurs. »

Le roi de l’enfer appellera celles qui n’ont pas de tatouage sur le visage.

Daw Gei Sein, 75 ans, de la tribu des Mun

De religion animiste, les Chin ont vécu isolés dans les régions montagneuses de Birmanie (Myanmar), pendant des millénaires. Ils seraient arrivés au IXe siècle après J.C. Plusieurs théories expliquent l’origine de ces migrants. Ils viendraient du Bangladesh ou de la Chine. Selon une hypothèse, des travailleurs se seraient échappés du chantier de la Grande Muraille. Ils se seraient alors réfugiés dans les montagnes. Longtemps protégés, les Chin n’ont pas eu à subir les invasions extérieures comme celle des Mongoles, en 1287. Leur culture est restée intacte même si c’est difficile de trouver des écrits anciens. En effet, les différentes tribus ne possèdent qu’une tradition orale. Les légendes se sont transmises de génération en génération. Daw Khui Shing Awi, Daw Gei Sein, Daw San et toutes les femmes aux visages tatoués connaissent ces récits.

Légendes d’une pratique millénaire

« Le roi de l’enfer appellera celles qui n’ont pas de tatouage sur le visage […] Les dieux ne montreront de la bonté qu’aux filles tatouées. Celles qui n’ont pas de tatouage ne verront que le mauvais chemin. » raconte Daw Gei Sein, âgée de 75 ans. La femme appartient à la tribu Mun et vit à Mindat, une ville de l’État Chin. Dans son village, malgré l’interdiction du Gouvernement birman dans les années 60/70, de nombreuses femmes ont longtemps perpétué la tradition du tatouage facial. Cette pratique est nourrie par de nombreuses légendes et fait partie intégrante de l’identité des Chin.

La mythologie qui revient régulièrement est celle du roi birman. Il se rend dans les régions montagneuses où les femmes sont connues pour leur beauté. Il enlève une Chin et l’emmène de force dans son palais pour l’épouser. Furieuse, la jeune femme s’enfuit. Craignant d’être de nouveau enlevée, elle décide d’inciser son visage pour devenir méconnaissable. « C’est comme si elle volait sa propre beauté afin de se protéger du roi », explique Daw San, 60 ans, de la tribu des Munn. Elle conclut en souriant : « Chaque petit enfant connaît cette histoire ». 

Les Chin sont belles avec leur visage tatoué, leur costume traditionnel, leurs grandes boucles d’oreilles et leurs colliers.

Daw Khui Shing Awi, 71 ans

Un récit populaire concerne aussi l’identification des tribus en cas d’enlèvement. Selon les anthropologues occidentaux, la légende du roi birman symbolise les envahisseurs extérieurs. Une théorie explique que le tatouage facial avait pour but de repousser les hommes des autres tribus. Puis, il aurait évolué vers des symboles de force et de beauté. Encouragée par ses parents à se faire tatouer, Daw Khui Shing Awi, de la tribu Mun, confirme : « C’est un peu douloureux, mais je pensais que je serais belle comme les autres ». La femme de 71 ans explique que les Chin sont tellement belles avec leur visage tatoué, leur costume traditionnel, leurs grandes boucles d’oreilles et leurs colliers.

@pixabay

Abonnez-vous !

Si vous aimez mes articles, je vous remercie de vous abonner à ma lettre mensuelle d'informations !

Loading...

Laisser un commentaire

Alexandra Bay

+++ Auteure de LOVE, TATTOOS & FAMILY, (ISBN : 2916753214) +++ Co-Fondatrice de FREE HANDS FANZINE +++ TATTOW STORIES +++